Pourquoi ?
C'est vrai ça, pourquoi écrire (pourquoi t'écrire ?) à ce sujet ? Et a quel sujet d'abord ?Je ne sais pas trop et est-ce si important de le savoir finalement ? Je ressens l'envie, le besoin de le faire, alors let's do it und basta.Et s'il faut néanmoins trouver une explication, disons que c'est pour t'expliquer pourquoi j'ai essayé d'avoir tes coordonnées.
Le commencement
C'est assez commun de commencer par le commencement, n'est-ce pas ? C'est aussi assez commun de ne pas savoir où se place le début, comment décider du moment où " tout a commencé ". Les écrivains ont parfois recours à des astuces. Je ne suis pas écrivain, alors, hein...On va dire que le commencement c'est quand nous avons parlé ensemble pour la première fois. Tu es venue me voir (c'est donc toi qui as commencé… c'est pratique d'être celui qui écrit !), lors de cette soirée du 31 décembre où j'étais l'un des quatre DJs amateurs. Tu as demandé à ce qu'on passe des morceaux un peu rock. Il me semble t'avoir dit qu'on allait en passer, te demander ce que tu entendais par " rock " (c'est vaste), t'avoir listé quelques uns des morceaux rock de ma playlist, dont du AC/DC.
- Tout de même pas !, as-tu répondu…
- Alors quoi ?
- Je sais pas moi, PJ Harvey, des trucs comme ça…
- Je n'ai rien qui ira… Mais tu verras ça devrait tout de même te plaire.
Bon je ne mentais pas. Du PJ Harvey j'en avais un peu, mais rien que je considérasse comme dansable dans une telle soirée. Tu sais, les gens ne dansent que sur des morceaux qu'ils connaissent déjà ou qui sont vraiment faits pour attirer sur le parquet gesticulateurs et trémousseuses. Mes PJ Harvey et autres ne rentraient pas dans ce moule et auraient vidé la piste en moins de 10 secondes.
Par la suite, lorsque certains morceaux rock de ma playlist furent exhalés par les enceintes, je suis venu te voir, plusieurs fois, et t'ai demandé si c'était assez rock pour toi. Les bulles de champagne ayant eu l'idée de secouer mes synapses, je ne me rappelle plus trop pourquoi ni comment, mais tu m'as répondu à plusieurs reprises :
- Ah oui, mais non. Je sais je suis chiante… Et du PJ Harvey alors ?
Mais qu'est-ce qu'elle a donc cette PJ Harvey que tu la veuilles absolument pour rythmer tes soubresauts et tes entrechats ?
Est-ce lors d'une ces occasions que nous commençâmes à danser ensemble ? Je ne saurais le dire à coup sûr.
Dancing
Car nous dansâmes. Et pas qu'un peu me semble-t-il. Moi qui ne danse plus beaucoup, par manque de temps, d'occasions, de partenaires, ça m'a remué de l'intérieur. Et de l'extérieur aussi. Enfin ça a remué mon corps, ce qui était carrément agréable. J'ai aussi eu l'impression que ça ne te déplaisait pas, mais là, peut-être que je prends mes désirs pour des réalités.Des signes
Des signes il y en a eu quelques uns. Le premier auquel je pense est assez caractéristique. Dans la catégorie signe du destin !Nous dansions ensemble et, sans que je n'y sois pour rien, mon alliance n'arrêtait pas de manquer de glisser de mon annulaire et de tomber. Difficile de bien danser dans ces conditions, non ? J'ai alors pris le temps d'arrêter nos volutes rythmiques afin d'enlever cet anneau (qui est un peu trop grand, je le sais, mais qui d'habitude tient tout de même suffisamment pour ne pas glisser tout seul…) Etait-ce là une conséquence de la torridité du moment ? Je ne saurais le dire. Par contre, j'ai remarqué que ta copine (je sais maintenant que c'est Katherine, mais à l'époque je n'en savais rien) a vu mon geste et qu'elle t'a espièglement fait remarquer ce qui se passait. Je n'ai pas entendu ce qu'elle te disait mais c'était assurément quelque chose du genre " Regarde Marie, il est obligé d'enlever son alliance pour danser avec toi ! ".
D'autres signes il y a dû en avoir. En tout cas j'ai dû en voir. Et certains d'eux ont dû me faire croire ou me faire comprendre que si les choses continuaient ainsi, la danse sur le parquet pourrait bien se transformer en ébats dans la soie d'un lit.
Alors attends, attends. Non, mais si, attends ! Ne va pas croire que. Pas du tout… Je ne suis pas du tout, mais alors vraiment pas, le genre de gars à m'imaginer ces sortes de choses d'habitude. En règle générale, je suis même plutôt enclin à ne pas voir ces signes, à ne pas y croire. Il me faut parfois une confirmation écrite, en double exemplaire, certifiée conforme par Eros et Aphrodite, afin de consentir à envisager de telles frasques. Juré.
Mais là, je ne sais pas. S'il n'y avait pas eu ces signes, pourquoi à un moment aurais-je jugé nécessaire de te glisser, lorsqu'une de nos passes amena ma bouche près de ton oreille, que j'étais marié et avais deux enfants ?
Je ne sais pas, je n'explique pas. Et je ne crois pas que j'aie vraiment besoin de l'expliquer. Ces signes je les ais ressentis. Qu'ils fussent vrais, avérés, voulus, c'est une autre paire de manches. Et pas des moindres, pas de la manche de débardeur ou même de tee-shirt, non. De la manche bien évasée, longue, limite kimono, dans laquelle un prestidigitateur pourrait cacher un zoo en entier.
En tout cas, je le comprends maintenant, ce renseignement que je te glissai n'était pas une invitation à cesser le jeu qui était le nôtre (bon d'accord, que je croyais être le nôtre), mais une recommandation à le faire discrètement !
Ben oui, toi tu ne connaissais qu'une ou deux personnes dans cette soirée, moi je les connais quasiment tous. Et quasiment tous aussi connaissent mon épouse et mes enfants. Trop d'ostentation aurait certainement causé racontars et problèmes voire déchirements, cris et vaisselle brisée.
How can I dance with another, ooooh, when I saw here standing there
Plusieurs de mes partenaires de danse habituelles étaient présentes à cette soirée et, de temps en temps, elles m'ont entraîné pour quelque farandole ou danse collé-collé, collé-serré, dont nous avons l'habitude et qui sont parfois assez torrides.Mais là, impossible.
J'ai bien essayé, mais le contraste avec nos danses à toi et moi était tel que je n'y arrivais pas. Pas de plaisir, aucun répondant de ma part, impossible de me mettre au diapason rythmique qu'il aurait fallu avoir pour que ça prenne.
Bloody hell ! Damned ! Et toutes ces sortes de choses.
La Magie
Plus la soirée avançait plus nous dansions. Plus nous dansions, plus la magie opérait. En ce qui me concerne tout du moins.Mais qu'entends-je par " magie " te demandes-tu peut-être ?
Simplement ce qu'on ne peut expliquer. Ce que je ne peux pas expliquer, mais qui opère, qui a bien l'air d'avoir des effets. Et ces effets étaient tels que je commençais à chercher des solutions.
Des Solutions
Oui des solutions. A des problèmes tels que :Comment finir la soirée avec toi ? Sans que ça ne devienne LE sujet de discussion du lendemain dans la bande de mes potes, qui étaient quasiment tous là
Comment te revoir ?
Comment avoir une hypothétique future relation avec toi ?
Bon, là oui, tu peux le dire, je prenais mes désirs pour la réalité. J'avais peut-être perdu une partie de ma lucidité. Ok, ok.
Ben oui, je suis le genre de gars qui ne peut pas s'empêcher de chercher des solutions. Et parfois d'en trouver d'ailleurs. Ca fait partie de mon job. Mais c'est une autre histoire (même si ce n'est pas forcément un beau roman).
Une des seules solutions que j'ai mises en œuvre alors fut de trouver de quoi écrire mon numéro de mobile et de te le donner. Sur un ticket de métro. Je te l'ai donné entre deux danses alors que je te voyais farfouiller dans ton sac à main. Et tu l'y as mis. Dans ton sac. Ce ticket griffonné. Je m'en rappelle encore. Dessus j'y ai écrit mon numéro de téléphone, et mon surnom. Je n'avais plus toute ma tête, bien sûr, car j'aurais pu t'y mettre aussi au moins mon adresse de mail. Et d'autres façons de me retrouver, au cas où le cœur t'en dît. Le monde moderne fourmille de plein de façon de se contacter.
D'autres signes
Avec le recul, je me rends compte que tu m'as envoyé d'autres signes, plus tard dans la soirée.Des signes de modération… Peut-être avais-tu changé d'humeur, d'avis, d'impression à mon sujet ? Une fenêtre s'était peut-être refermée (ou n'avait jamais existé que dans mon esprit). Ou d'autres s'étaient ouvertes. Des courants avaient bien pu emporter tes pensées dans d'autres directions. Mais quoiqu'il en soit, tu avais bien dû te rendre compte de mes réactions…
Le plus éloquent de ces signes-là, mais que je n'ai pas interprété ainsi sur le moment, fut que tu m'as dit à plusieurs reprises que " c'était bien agréable d'avoir dansé ensemble ". Avec le recul, tout en me rappelant à peu près de ta façon (fort diplomatique je dois le dire) d'exprimer la chose, il me semble qu'on aurait pu y déceler une façon de dire " c'était agréable d'avoir dansé ensemble, voila, mais c'est tout, ça n'ira pas plus loin, restons-en là bons amis si le cœur nous en dit et à la prochaine, pas avant… ". Une autre puce eût pu sauter à mon oreille lorsque, pour une fois que je venais vers toi plus pour discuter plus que pour danser, tu m'as pris les mains, m'as dit " tu veux danser, c'est ça ? " et m'as entrainé sur la piste sans vraiment me laisser l'opportunité de répondre. Mais j'acceptai avec joie, je ne voyais pas ça comme une punition. Loin s'en faut.
Epanchement et partage
L'intensité de la fougue qui m'avait pris était telle que je ne pouvais pas garder ça pour moi. J'avais besoin de partager un peu de la chose, de cette magie. J'aurais pu penser à le faire avec toi, mais il y a en moi des restes d'un côté ado timide. Tu sais, le genre j'ose-pas-des-fois-qu'elle-me-dise-non. Ce qui ne m'a pas poussé à te confier mon désarroi. Par contre, je m'en suis ouvert à Marianne. Pas notre hôtesse, non, Marianne la compagne d'Hervé, un de mes amis d'enfance (plus de 35 ans que nous nous connaissons… Ben oui, je suis quasiment une personne âgée et j'ai des amis fidèles et de mon âge !). Mais si, tu sais, une petite brune avec des yeux verts grands comme ça.Elle me suggérait d'y aller simplement et franchement, de te dire que j'avais envie de t'embrasser. Ce qui était vrai. Que j'avais tellement apprécié de danser avec toi. Etc. Naturellement, nous en sommes venus à évoquer mon manque de liberté en ce domaine et, sans nous attarder dessus, j'ai invoqué le manque total de capacité de mon épouse à se trémousser et se balancer en rythme. Et que ça me manquait beaucoup, à moi qui adore ça et qui ne me souvenais presque plus que c'était si bon quand ça fonctionne, quand la magie est là. Marianne embraya tout d'abord sur le mode " tu ne pourrais pas essayer de " soigner " ce symptôme dans ton couple directement, par exemple en prenant des cours de tango ? ". De tango ! Une coordination et un sens du rythme qu'il faut des années pour acquérir. Je lui fis vite comprendre qu'à mon avis il y avait une impossibilité structurelle, voire infrastructurelle et que c'était peine perdue, même avec des cours de zouk, que la vie était courte, les occasions de rencontrer la magie forts rares, bref que c'était avec toi que je voulais me balancer aux rythmes de trémoussements synchrones ou syncopés. Du moins à ce moment là…
Elle comprit fort bien.
Et au bout d'un moment, mais néanmoins plus tard, je la vis en grande discussion avec toi, alors qu'apparemment tu t'étais préparée à partir peu avant. Marianne me jeta un regard entendu mais ne lâcha pas l'affaire, si bien que tu restas encore un certain temps, à discuter dans le couloir. Pour ma part, je passai deux ou trois fois alentour, n'essayant même pas de m'immiscer diplomatiquement. Savoir que tu étais encore là semblait me suffire. Le champagne a ce genre d'effet parfois…
Séparation
Je dois avouer que je ne me rappelle plus bien si tu es revenue sur la piste après cette cordiale discussion coridoriale. Il me semble que oui, mais je ne saurais l'affirmer.Quoi qu'il en soit, il fallait bien partir à un moment et c'est ce que tu as décidé de faire. Avec " cette fille " qui rentrait en métro et que tu allais accompagner, ou qui allait t'accompagner, c'est assez réciproque. Tu es partie et, alors que je n'avais rien prémédité (comme l'aurais-je pu de toute façon), j'étais dans l'entrée/vestiaire lorsque tu es revenue peu de temps après pour récupérer ton pull que tu avais oublié. Le froid mordant et la neige qui commençait à tomber ont dû te rappeler aux bons souvenirs de ce brave cachemire. Ou mohair. Bref de la fibre dont était tissée l'étoffe de ce vêtement indispensable. Nous étions donc tous les deux dans cette entrée. Nous étions quasiment seuls je crois., mis à part Louis qui avait trop bu et s'était écroulé sur le canapé fortuitement disposé à cet endroit. J'ai dû avoir un regard de chien battu, ou plutôt de chien abandonné. Ai-je essayé de te retenir doucement ? De te prendre la main alors que, lancée sur ton aire, tu voguais vers la porte cochère ? Toujours est-il que la dernière image que je garde de toi fut celle de nos bras tendus l'un vers l'autre. Avec nos mains au bout, la tienne gantée. Mais tu as continué sur ta lancée. Il faut dire que " cette fille " t'attendait dehors, sûrement dans le froid.
Il y eut encore un signe, encore un que je ne vis pas, ou ne compris pas … Plutôt une absence de signe. Pas de bises. Pas de baiser.
Mais d'un autre côté, pas de mots non plus (ou alors je ne me rappelle plus… J'aurais pu dire " tu m'appelleras ? " mais je ne crois pas l'avoir fait).
J'aimais l'image de nos bras tendus l'un vers l'autre, avec nos mains au bout, la tienne gantée, s'éloignant.
Je ne m'en faisais pas trop car je savais que Marianne avait pris ton numéro de téléphone, je pensais donc pouvoir avoir une chance de faire perdurer cette magie qui m'avait envahi.
Retour
Il me fallu rentrer à mon tour. Sans encombre, je me retrouvai chez moi, à ne pas vouloir que cette soirée de changement, changement d'année et de lune, changement de décennie, changement de vie, ne se terminât. Je la fis donc durer encore un peu, seul, avec un tour dans mon jardin, à fumer sous des bourrasques de neige et un vent assez violent.Autre signe : Il se trouve que certains des événements importants de ma vie ont été marqués par des vents violents. Par exemple, l'ouragan de 1987, la tempête de 1999. A chaque fois des événements de ma vie amoureuse. Ou sexuelle. Voire des deux, dans les meilleurs des cas…
Plein d'espoirs, de magie, de champagne et de fumée, je finis par aller me coucher.
Lendemain
La nuit fut assez courte mais suffisamment réparatrice. Et puis la magie ne m'avait pas quitté. Bon signe me disais-je.Le lendemain soir, nous nous rendîmes, en famille cette fois, chez des amis où se trouvaient aussi une grande partie de nos compagnons de la veille... Marianne-la-compagne-d'Hervé y était aussi et, bien qu'en famille, je réussis à lui parler un peu de " notre affaire ".
Elle me demanda si je n'étais pas trop déçu. Je lui répondis que non, que ça ne pouvait pas se passer vraiment autrement de toute façon. Je ne suis pas homme à abandonner mes responsabilités. Au contraire. Et c'est un des carcans de ma vie. Mais c'est aussi une autre histoire.
Je réussis à lui faire promettre de m'envoyer ton numéro de téléphone par SMS. Elle demanderait mon propre numéro à Hervé, son compagnon, et me ferait suivre le tien. Note que je n'ai pas les coordonnées de Marianne non plus, ni même son nom de famille. Je suis un débutant, un amateur, c'est indéniable.
Tout semblait rouler, ou presque.
Peu après, mon épouse invite Hervé pour le week-end suivant. Il faut dire qu'Hervé est une sorte de cousin de la soeur de mon épouse. Tout cela s'imbrique, bien pire que les imbroglios familiaux des cours royales en Europe à la fin de la Renaissance. Non je déconne, pas à ce point !
J'avais ma fille dans les bras lorsque cette invitation fut lancée. Je suis un gars poli, je propose donc à Marianne de "venir avec" comme disent les alsaciens. Ca me semblait relever de la plus élémentaire bienséance.
Et là, erreur fatale.
Recherche Marie désespérément
Donc si tu suis bien le calendrier, là on est samedi soir. Le lendemain de la soirée où toi et moi dansâmes comme des damnés, et qui remplit mon âme d'envies polygames.Pas de soucis, je me disais que j'aurais ton numéro le soir même ou le lendemain au plus tard. J'étais déjà bien accro, bien obnubilé, mais je n'allais pas devenir relou au risque de voir se refermer la seule porte que j'avais de te contacter à nouveau.
Car, de toi, je ne connaissais que fort peu de choses finalement :
Ton prénom : Marie.
Tu m'avais dit être instit (mais avais-je bien entendu ? la musique était un peu fort. C'eût pu être aussi " artiste "… Non je ne le crois pas. Pas que tu ne puisses être artiste car à mon avis, tu en as l'âme. Mais je ne crois pas que tu aurais dit " je suis artiste ". Plutôt " artiste peintre " ou " danseuse " ou " pianiste ". Ah non, pas pianiste, je t'ai demandé si tu jouais d'un instrument et tu as répondu non. Ou alors " graphiste ". Ouais, peut-être " graphiste ").
Autre indice : j'avais surpris, au détour d'une conversation, que tu rentrais dans le 3ème arrondissement.
Comme le diraient le commissaire Bougret et son adjoint Charolles dans la rubrique-à-brac de Gotlib, c'étaient là de bien maigres indices.
Je ne savais pas avec qui tu étais venue à la soirée, qui tu connaissais, qui était susceptible de me donner tes coordonnées ou un moyen de te contacter. Voire même ton nom de famille. Je t'avais bien vue parler avec une femme qui ne pouvait certainement être qu'une copine à toi, lorsqu'il m'avait fallu enlever mon alliance pour danser. Mais impossible de me savoir qui était cette demoiselle que j'étais sûr de n'avoir jamais vue auparavant non plus.
Afin de faire comprendre l'urgence de mon espoir, j'envoyais néanmoins deux messages à Hervé, un mail et un sms, lui demandant de rappeler à Marianne qu'elle devait me faire passer un numéro de téléphone.
Dimanche soir arrive. Toujours pas de nouvelles.
Ca se complique
Ne pouvant penser à autre chose, je décide alors de prendre les cornes du taureau avec le côté concave de la cuillère à pot. Vite un prétexte pour lancer d'autres sondes…Je devais contacter notre hôtesse, ainsi que son beau-frère, pour essayer d'avoir les coordonnées de quelques autres participants à la soirée, avec qui j'avais évoqué le possibilité de monter un petit atelier artistique, chansons, peut-être danse, vidéos. La faute au champagne toujours, et les projets liés au changement d'année et de décennie… En plus, j'avais évoqué la possibilité que le beau frère en question participât à cet atelier en nous fournissant des textes. Je les contacte donc, tous les deux. Et au passage, je leur demande s'ils ont les coordonnées de " Marie la danseuse brune ". J'eus bien quelques réponses, mais aucune coordonnée. Ni de toi ni des autres d'ailleurs. Merci la solidarité !
Je commence alors à cogiter et à essayer d'imaginer quelques solutions.
Evidemment, je ne pouvais pas balancer sur le mail que je cherchais à te retrouver, ça aurait fait jaser. Ou bien il aurait fallu un bon prétexte et je ne me voyais pas en inventer un, mentir trop effrontément, ça ne me paraissait pas jouable.
Il ne me restait que Marianne et son numéro de téléphone (enfin le tien). Je relance donc Hervé, sans plus de résultats car je ne réussi qu'à avoir sa messagerie.
J'étais alors dans un certain état de fébrilité à ce sujet. Je sentais confusément qu'il ne fallait pas trop tarder ou tergiverser, que le fer refroidi serait plus dur à modeler, que l'effet se recule ainsi que le désir, que le souvenir de la magie s'estomperait de lui-même, surtout de la magie que tu aurais peut-être aussi ressentie, si tu avais ressenti quelque chose de tel.
Je lançai donc quelques sondes supplémentaires, dont Henri et Rafaël avec qui je compte fonder le " noyau dur " de notre atelier, du moins sa partie musicale. Je leur demandai s'ils avaient tes coordonnées, en te nommant " Marie la brune du 31 " ou " Marie la danseuse du 31 ", voire, " Marie la belle et fougueuse danseuse brune ".
Aucune nouvelle. Mes messages, mails et vocaux restèrent sans réponse.
Lundi passe ainsi.
Souvent femme varie
Et puis mardi matin, coup de fil d'Hervé. Il me demande si je suis " tranquille " pour parler. Mon épouse étant en train de travailler en bas dans son bureau, je réponds que oui. Il commence à me dire que je ne peux pas " tout mettre sur le dos de Marianne comme ça ". Incompréhension totale de ma part et chute de mes deux bras sur le carrelage. Comble de malchance, impossible de rentrer dans les détails ou de demander des explications car mon épouse décide finalement de faire la navette entre son bureau et le salon où j'avais pris l'appel. J'atermoie quelque peu et explique à Hervé que je le rappellerai plus tard.Plus tard, je peux appeler Hervé tranquillement depuis ma voiture. J'appelle donc. Et là j'ai une " explication ". Selon lui, je n'aurais pas assez " segmenté " ma relation avec Marianne. Et placer cette demoiselle dans la double position délicate d'intermédiaire d'un adultère potentiel en même temps que d'une amie de la famille officielle lui causa un grave dilemme. Tellement grave qu'elle se rongea les sangs jusqu'aux plaquettes à ce sujet, se disputant même avec Hervé. J'en tombai des nues. Que de complications ! Mais en même temps, mon empathie fonctionnant, je compris, au moins un peu, la position de Marianne à ce sujet.
Se mettant à la place des uns et des autres (enfin des unes et des autres plus exactement), elle ne se sentait peut-être plus du tout à l'aise pour me transmettre ton numéro. Ni même pour t'appeler afin de te demander si elle avait ton accord pour ce faire. Ni même pour t'appeler tout court d'ailleurs car, les effets du champagnes étant retombé chez elle aussi (mais pourquoi est-ce temporaire, c'est énervant à la fin ?), elle ne voyait plus vraiment d'autre raison de te contacter que de jouer les intermédiaires pour ma pomme. Peut-être avait-elle peur de prendre la responsabilité de briser mon couple, d'avoir une responsabilité, même minime, dans la transformation de mes enfants en enfants de divorcés ? Moi tout ce que je voyais c'était que l'unique piste qui m'aurait permis de te recontacter partait en fumée. Je le dis tout net à Hervé et il me signifia qu'il n'était pas question que lui intercède en ma faveur, que cette histoire avait déjà bien mis du sable dans les rouages de son couple. Et il me dit :
- Ecoute, je crois que Marie est venue et repartie avec Rafaël et Catherine. Vois avec eux.
- Mais je sais qu'elle est repartie en métro, avec une fille
- Ben Rafaël était peut-être à les attendre dehors. Et la fille c'est peut-être Catherine. Vois avec Rafaël je te dis.
Rafaël est aussi un très bon ami, de ceux avec qui je peux pratiquement tout partager. Je réponds alors :
- Mais je n'arrête pas de le relancer le père Rafaël, il ne répond ni à mes messages laissés sur sa messagerie, ni à mes e-mails, ni aux SMS, ni par skype… Il est in-joi-gnab'.
- Ben c'est néanmoins tout ce que je peux faire. Et tu n'auras pas le numéro de Marie par Marianne, c'est tout à fait exclu. Hors de question. Niet.
- Bon, OK, je comprends. Je relance Rafaël une fois de plus alors
- Voila, t'as qu'à faire ça.
Je raccourcis ces conversations qui furent ô combien plus longues. Hervé m'y expliqua que Marianne était bien différente dans les ambiances " fête " qu'au quotidien. Ce qui est compréhensible car on n'ingurgite pas une bouteille de champagne par personne au quotidien, même si ce quotidien est nocturne. A jeun, elle est très sensible (ce qui voulait dire, je pense, " un peu compliquée " mais Hervé ne le formulerait jamais ainsi). Je me suis aussi aperçu à cette occasion qu'Hervé savait fort bien arranger les faits pour leur faire dire ce qu'il avait envie qu'ils disent. Et que sa mauvaise foi pouvait être assez remarquable. Si je n'en avais pas fait les frais, je l'en aurais presque admiré, car ça confinait quasiment à de l'art.
Intermède
Et voila, avec tout ça, on est déjà mercredi 6 janvier. Le 6 janvier c'est l'anniversaire de Matthieu. Matthieu est un ami de fac. J'en suis aussi plutôt proche et il n'y a que peu de choses que nous ne pouvons pas nous dire. Nous savons aussi, du moins je l'espère, garder pour nous ce que l'autre nous a confié.Bref je l'appelle pour son anniversaire.
- Allô Bill ? (Matthieu est surnommé Bill, mais c'est une autre histoire. Je te dis, les cours d'Espagne et d'Autriche-Hongrie n'ont rien a nous envier)
- Ouais ma poule (il dit souvent ça)
- Devine pourquoi je t'appelle ?
- Ah ben je vois pas. Vraiment.
- C'est rituel, je t'appelle quasiment tous les ans pour ton anniversaire.
- Ouais, tu sais, moi mon anniversaire…
- Ouais, je sais que le fait de vieillir d'un an n'est pas forcément le symbole que tu préfères, mais dis toi que ça me permets de t'appeler au moins une fois par an !
- C'est sûr.
- Bon sinon ça va ? Tu es bien rentré après le 31 ?
- Ben ouais. On a ramené Rafaël et Catherine chez Catherine et puis on a été dormir chez Rafaël, il nous prêtait son appart.
- Ah cool ! Son appart d'avant son divorce ?
- Ouais celui là.
- Il est bien ?
- Ouais c'était sympa.
Je te passe le reste de la conversation, non qu'elle soit inintéressante de mon point de vue, mais elle n'apporte rien à mon récit, là. Alors qu'une information pour moi capitale dans ma quête fût glissée dans le dialogue ci-dessus.
Souvent femme varie, suite
Obnubilé que je suis, je continue à harceler Rafaël. Sans plus de succès. En désespoir de cause, le lendemain, je rappelai Matthieu (Bill…) pour essayer de voir si lui aurait des informations que je n'aurais pas. Ben oui, parce que si Matthieu et sa copine avaient ramené Rafaël et Catherine, ça voulait dire que tu n'étais pas repartie avec eux. Je savais que tu étais repartie en métro, et je n'avais pas vu que Rafaël était avec vous. Mais je me fis cette réflexion que bientôt, seule mon épouse ignorerait que j'essayais désespérément de retrouver une belle danseuse brune, fougueuse et virvoltante, du nom de Marie, que j'avais croisée au 31 janvier.Cela ne m'arrêta pas. C'est te dire la monomanie qui était alors la mienne.
A la recherche de la Marie perdue
Donc j'appelle Matthieu et lui explique la situation- Allô Bill ?
- Ouais ma poule (bis repetitam)
- Incroyable hein, je t'appelle une deuxième fois juste après ton anniv. Dingue non ?
- Ouais, c'est sûr ? Qu'est-ce qu'il y a
- J'ai besoin de ton aide.
- Allons bon. Pourquoi donc ?
- Tu te rappelles la brune qui était au 31 avec qui j'ai pas mal dansé ?
- Ah oui, je vois bien, une des seules femmes intéressantes de cette soirée. (Matthieu a un goût très sûr mais très critique).
- Bon, je cherche à avoir ses coordonnées.
- Ah ben je peux pas trop t'aider mon vieux,
- Tu ne sais pas avec qui elle est venue ?
- Non, pas du tout. Tu n'as pas essayé d'avoir son numéro sur le moment
- C'est un peu compliqué, mais si. En fait, j'ai un peu évoqué avec Marianne, la copine d'Hervé, mon attirance pour cette danseuse. A un moment, Marianne a discuté assez longuement avec ma danseuse et elle a même pris son numéro. Elle devait me le donner mais maintenant elle ne veut plus.
- Allons bon. Pourquoi ?
- Je ne sais pas trop, elle doit avoir peur de briser mon couple ou un truc comme ça. Enfin elle a l'air bien compliquée et Hervé ne va pas faire d'effort pour moi sur ce coup là
- Ah ouais, je vois. Ben non mon gars, je sais pas du tout qui c'est ta danseuse.
- D'après Hervé elle est venue et repartie avec Rafaël et Catherine…
- Je peux te dire qu'elle n'est pas repartie avec eux, vu que c'est nous qui les avons ramenés.
- Merde alors. Comment faire… Tu ne veux pas te faire passer pour un commissaire de police et on invente un truc, on appelle Marianne (notre hôtesse) pour essayer d'avoir des infos ? Genre un appel à témoin, on dit qu'on cherche une fille qui est sortie de chez elle vers 5 heure du matin, qui aurait peut-être vu un truc une agression, un vol, je ne sais pas moi…
- Ca va être difficile je crois. Tu ne sais même pas comment elle s'appelle ta danseuse…
- Je connais son prénom, c'est Marie, je ne te l'avais pas dit ?
- Ben non
- Cela dit, ce n'est pas comme si elle s'appelait Eunice ou Calypso. Des Marie y'en a pas beaucoup à Paris… Je ne peux même pas faire une recherche sur son prénom.
- Tu sais quoi d'autre ?
- Ben pas grand-chose, on n'a que peu parlé, vu qu'on a surtout dansé. Je crois qu'elle est instit et qu'elle habite dans le 3ème.
- Ah ouais c'est un peu léger comme indices.
- Comme tu dis. Je ne vais pas me taper les sorties de toutes les écoles du 3ème tout de même ! Je risque de me faire indûment repérer comme un pédophile. Bon, c'est vrai que je n'ai pas à faire la sortie des élèves mais celle des instits. Mais ce n'est pas jouable…
- Ouais, je crois que tu vas devoir te mettre la bite sous l'oreiller pour cette fois-ci
(il a vraiment dit ça, je le jure ! Les hommes entre eux ne s'embarrassent pas souvent de fioritures).
- Ce n'est même pas la question. Enfin si un peu, forcément. Mais ce n'est pas l'essentiel. J'ai vraiment envie de la revoir. Si je pouvais encore réfléchir de façon cohérente, je penserais que je suis amoureux.
- Mon pauvre gars, t'es mal barré.
- Ben ouais. Je ne vais tout de même pas envoyer un message à la cantonade…
- Non ça ne le fait pas du tout…
- Bon. Tant pis. Toi tu ne vois pas avec qui elle est venue ? Pour Rafaël et Catherine tu ne sais pas ?
- Ah non, désolé. Ils n'ont pas parlé d'elle dans la voiture je crois, ou alors je n'ai pas entendu. De toute façon, chez Catherine c'était à côté de la fête alors le trajet a été plutôt court.
- Bon, OK. Merci tout de même
- Ben y'a pas de quoi, mais je n'ai pas fait grand-chose. Enfin, tiens-moi au courant
- Ouais d'accord. A plus.
Voila. A ce point du récit, nous sommes le jeudi 7 janvier, il est midi ou peu s'en faut. Ca va bientôt faire une semaine que je t'ai vue pour la première fois et à peine moins que je t'ai vue pour la dernière fois. Et je ne suis pas plus avancé.
Ah Si.
Un truc.
A priori, tu avais mon numéro de téléphone et tu ne m'as pas appelé. Mais je peux trouver plein de raisons pour ça. Tu as perdu le ticket de métro sur lequel j'avais gribouillé mon numéro. Tu n'arrive pas à le lire. Tu n'oses pas appeler… Tu as été refroidie dès que je t'ai dit que j'étais marié avec deux enfants car tu ne cherches que l'amour unique, prince-charmantesque, absolu.
Ou encore tu es toi-même en couple et ne cherche rien d'autre que ce que tu as…
Je n'ai pas d'autres moyens que de passer par le canal Marianne/Hervé. Et j'y retourne ! Quelle belle invention le téléphone tout de même (du moins pour moi, pas forcément pour ceux qui sont les victimes de mes harcelants appels). Cette fois ci, je demande à Hervé de m'aider directement.
- Allô, Hervé, c'est encore moi.
- Ouais quoi
- J'appelle toujours pour mon histoire là. Il faut que tu m'aides, je n'arrive pas à trouver les putains de coordonnées de Marie.
- Je t'ai dit, c'est même pas la peine d'espérer avoir le numéro de Marie de la part de Marianne
- Ouais, ouais, j'ai bien compris. Ce n'est pas ce que je te demande. Je te demande, à toi, de m'aider
- Mais moi si je l'avais ce numéro, je te le donnerai
- J'ai bien compris. Mais Marianne t'a peut-être donné, même sans le savoir, des infos qui me permettraient de pister la donzelle.
- Mais non, queue dalle. Pourquoi n'appelles-tu pas Rafaël ? Je t'ai dit qu'elle était avec Catherine et lui.
- Mais non, Rafaël et Catherine sont repartis avec Matthieu et sa copine, et il n'y avait pas de Marie avec eux.
- Ca n'empêche. Elle est venue avec eux.
- T'es sûr ?
- Ouais. Je crois que c'est une copine de Catherine
- Ah bon ? T'es sûr hein ?
- Mais oui. Appelle Rafaël je te dis. A moins que ça te gène de lui demander ça. Si tu veux je le fais moi, je lui demande. Ou même j'appelle Catherine, c'est aussi une copine à moi.
- Mais non ça ne me gêne pas. Cela dit je ne fais que ça d'appeler Rafaël depuis une semaine putain. J'ai dû lui laisser 50 messages en tout ! Il est over busy. Peut-être il ne veut pas me répondre, je ne sais pas. Enfin, t'es sûr que c'est avec eux qu'elle est venue ? Parce que comme je n'en étais pas certain moi, j'ai un peu noyé mes demandes au milieu d'autres trucs, tu comprends ?
- Oui. Je te l'ai dit : Elle est venue avec Carline et Rafaël, mais tu ne me crois pas…
- Ben écoute tu m'as dit qu'elle était repartie avec eux et ce n'était pas le cas. Et tu n'avais pas l'air certain qu'elle était venue avec eux non plus hein. Alors…
- Si si. Je te le dis.
- Bon, OK merci alors. Je rappelle Rafaël une énième fois
Enfin
Mais plutôt que de rappeler Rafaël, je lui envoyai un SMS. Concis et précis :" J'ai besoin que tu me fasses passer les coordonnées de Marie la brune du 31. Téléphone ou mail. Please ".
Et là, surprise, peu de temps après, une réponse
" Laisse tomber, Nico est déjà sur le coup. Laisse lui sa chance "
Nico est aussi un ami de longue date. Du Lycée. Un très bon ami. Mais avec qui il y eut, dans le passé, une histoire de femme, résolue je pense. Et d'argent, pas complètement soldée mais sans gravité pour notre relation. Cela dit, le fait qu'il soit sur les rangs de tes prétendants ne pouvait pas m'arrêter à ce stade. Surtout si, de son côté, il était encore très " early stage ".
Je réponds à Rafaël aussi sec, par SMS aussi, puisque ce canal semblait enfin fonctionner :
" Faux-frère va. Je m'en fous, je te harcèlerai jusqu'à ce que j'aie ce que je veux ".
Et quelques minutes après, j'appelle Rafaël. Il décroche. Yes !
- Hey false brother ! Tu sais pourquoi je t'appelle !
- Ouais. Elle a eu du succès dis donc. Nico m'a appelé dès le lendemain, il était comme un fou. J'ai transmis à Catherine qui a organisé une rencontre aussi sec.
Merde. Aurais-je été grillé sur le poteau ? Grillé par mes poteaux ?
- Ce n'est pas une raison pour m'évincer de la course et de la sorte.
- Mais t'es maqué, lui il est seul depuis un bout de temps.
- M'en fous. Allez quoi, juste son e-mail. Je veux juste pouvoir communiquer un peu avec elle.
- Bon, écoute je ne les ai pas moi ses coordonnées, c'est une copine de Catherine
- Ben tu peux demander à Catherine.
- Je vais essayer.
- OK, cool, je te revaudrai ça vieux !
- Je te tiens au courant
- Merci.
Et voila.
Enfin.
Délivrance
Et finalement, peu après, je reçois un SMS de Rafaël." J'ai transmis ta demande. Elle n'est pas intéressée. Trop vieux ! C'est ce qui s'appelle un râteau je crois. Mais ne t'inquiète pas, on restera discret "
Mon château de carte d'Espagne s'effondre alors. Je me sentis évidemment triste et malheureux, mais en même temps soulagé. Soulagé de ne plus avoir à chercher, à savoir. Savoir si la magie avait une chance d'avoir été ressentie réciproquement. Et de savoir si un avenir magique, une magie à venir pouvait se profiler dans nos vies.
A priori mon analyse de ce qui avait pu se passer lors de nos tourbillons était plus de l'ordre du fantasme que de la réalité. Peut-être y a-t-il eu une fenêtre temporelle où la magie a opéré entre nous mais que cette fenêtre s'est refermée rapidement, sur tes doigts et pas sur les miens ? Peut-être même que c'était joué (et perdu) avant ton départ de la soirée ? Ca se pourrait bien, si tant est que cette fenêtre ait jamais existé et ait été suffisamment ouverte pour laisser passer les effluves d'une complicité partagée.
Je laissai passer le repas, dans un état second, réfléchissant à peine à la suite des événements.
Comme je devais aller poster urgemment, le soir même, une lettre, j'en profite, sur le chemin que je fis à pied vers la poste de mon bled, pour répondre à Rafaël, par SMS encore (les doigts gelés, c'était le 7 janvier 2010, il faisait plutôt froid si tu t'en rappelles) :
" OK, thanks bro. Pas intéressée par quoi ? Je n'ai rien proposé, on n'a que dansé. Je voulais juste lui parler, savoir ce qu'elle avait dans le centre. Et pourquoi elle voulait absolument du PJ Harvey. Ca danse pas ! "
The show must go on
Bien qu'un peu dépité, je me rendis compte que cette semaine passée à espérer, à imaginer, à ressasser des moments de magie ressentie m'avait fait me sentir vivant. Plus vivant que depuis bien longtemps.Et d'une certaine façon, ça m'a mis les pieds dans les étrillés, pour le premier jour du reste de ma vie.
Vivre au lieu de subir. Arrêter d'enchaîner les obligations, d'avoir ma vie rythmée quasiment uniquement par le devoir.
Thank You Girl
Oui, thank you girl. Comme dit la chanson : "and all I got to do is thank you girl, thank you girl".Merci d'avoir dansé avec moi. D'avoir réveillé de la magie en moi. De m'avoir fait vibrer pendant 7 jours. De m'avoir rappelé que la vie pouvait être autre.
Qu'elle doit l'être.
Et que l'équilibre est un but en soi, que mon équilibre à moi passe certainement par des choses comme la danse, la création " artistique " (pas comme ces pauvres lignes néanmoins ; je ne pense pas que j'appellerai ça une création artistique).
Des rencontres.
Une vie dans la vie peut-être. Des secrets. Certains partagés seulement à deux, et pas forcément dans le cadre de la famille nucléaire. Boum.
Nous ne nous reverrons peut-être pas. Ou peut-être que si. Mais cette magie de Marie m'a laissé, pour toujours je crois, le souvenir d'un déclencheur, d'un catalyseur. Si jamais nous nous revoyons, je ne pense pas que je serai gêné. Pendant une semaine, j'ai beau avoir été très amoureux de toi (ne me voilons pas la face, il y a 30 ans j'aurais appelé ça un coup de foudre), je ne suis plus un adolescent, loin de là, et la gêne liée à ce genre de chose ne devrait plus me hanter. Mais qui sait ? C'est bien ce qui rend la magie si magique, cette imprévisibilité.
Merci aussi pour PJ Harvey. J'ai ré-écouté ceux que j'avais, j'en ai trouvé d'autres. C'est effectivement très bien. Mais par contre, si tu penses faire danser un rassemblement de fêtards sur du PJ Harvey, tu connais d'elle des morceaux que je ne connais pas ! Cela dit, du coup, je me suis remis à écouter Garbage et à découvrir des morceaux d'eux (nouveaux pour moi). Pourquoi passer de PJ Harvey à Garbage ? A cause d'un morceau live où il y avait PJ Harvey, Gwenn Stefani (No Doubt). Enfin je crois…
Back to the future
Mais il est temps pour moi de revenir à mon futur. A cet équilibre que j'ai entrevu, et dans lequel ton rôle semble " avoir été " plus que " devoir être ".Je ne vais pas te raconter ma vie passée ni mon existence future (bien que cette deuxième option puisse se révéler intéressante, il faudra que je creuse la question)… Mais les choses changent, autour de moi. Autour de toi aussi. Partout…
Mais bon, pour moi…
Depuis ce 1er janvier, j'en fais " moins ". Je garde plus de temps pour autre chose. J'ai arrêté d'essayer de " sauver le monde ". Enfin le petit monde qui gravite autour de moi et pour lesquelles je travaille encore. Et ne pas oublier que je dois garder du temps pour " autre chose " que marmots-auto-boulot-dodo.
Parmi ces autres choses, je me suis remis à faire un peu de musique. Pas encore grand-chose mais déjà ça fait du bien, de jouer, de chanter.
Et il faut que je me trouve des parenthèses, des fêtes, des ambiances dansantes et tourbillonnantes, des bols d'airs, des partenaires de jeu, d'un soir, d'une danse, ou pour des jeux plus suivis. Et des moments de silence, à ne rien faire que regarder et écouter la forêt. Ou la montagne. Ou la mer.
Du temps pour mes enfants aussi.
Du temps.
C'est ce qui nous manque à tous je crois.
C'est le cadeau que tu m'as fait. Tu m'as offert du temps. Et du bon j'espère !
The end
C'est la fin de ce (long) texte. Au moment où j'écris ces lignes, je ne sais pas du tout si je vais te les faire parvenir, d'une façon où d'une autre. Surtout qu'il semblerait que Nico et toi, ça puisse être " une affaire qui roule ". Ou en passe de le devenir. Il semble très amoureux de toi et, apparemment, si tu me permets cette petite pique, son âge, qui est de 8 mois de moins que le mien, ne te le fait pas trouver trop vieux, puisque lui ne s'est pas vu signifier une fin de non recevoir.Alors je ne devrais pas polluer une histoire possible, surtout avec une histoire impossible. Mais d'un autre côté, où est la pollution ? Je ne te demande rien, finalement. Je ne te propose pas de chercher à te revoir, ni quoi que ce soit de ce genre. Mais d'un autre côte, je sais fort bien qu'il y a potentiellement des questions latentes, voire des attentes, à chaque fois que quelqu'un dit "je t'aime" ou "je suis amoureux de toi" à quelqu'un d'autre. Bon, oui. C'est vrai. Mais mettons les pauses au choin. Je n'ai rien dit de tel, si ? Alors précisons. Disons que j'ai sûrement été amoureux de toi pendant une soirée, puis que la rémanence amoureuse a duré une semaine. Et s'est arrêtée.
Et si jamais tu voulais me contacter, ou si on devait se revoir, les choses ne seraient pas, en ce qui me concerne, tellement différentes de ce qui se serait passé si nous n'avions dansé qu'une danse ou deux, sans trop de magie.
Voila, maintenant, si tu as envie d'échanger deux trois trucs avec moi, de me faire partager un peu de ce que tu as dans le centre, peut-être de t'intéresser à ce qui se passe dans mon propre noyau, c'est avec joie que je te lirai ou t'écouterai et te répondrai. Ca fait un peu étrange de dire ça après avoir dit ce qui précède, mais bon, si les gens étaient simples euh, ça manquerait de complexité. Comme le vin. Les vins complexes sont les plus intéressants. Quand ils sont équilibrés !
Décision
A la relecture de mon texte, après un peu de réflexion, je ne te ferai pas parvenir ces lignes.Pas tant que Nico sera " sur le coup ". Et si vous finissez en couple, ce texte ne sera jamais lu, sauf peut-être à ma mort.
Ou alors si je change d'avis, ce qui est toujours possible !
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